Préparer le remplacement d’un salarié avant son licenciement

L’employeur peut-il préparer le recrutement d’un nouveau salarié, notamment en établissant une promesse d’embauche, pour remplacer un salarié en poste qu’il envisage de licencier ? Cette situation peut-elle caractériser un licenciement de fait ?

Si à l’issue de l’entretien préalable, l’employeur décide de licencier le salarié, il doit lui notifier sa décision par lettre recommandée avec avis de réception (LR/AR). La lettre de notification doit comporter l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur. Elle ne peut être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date prévue de l’entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué (C. trav. art. L 1232-6).

Dès lors que le licenciement n’est pas notifié au salarié par écrit, il n’est pas motivé, donc il est sans cause réelle et sérieuse. P.ex. un licenciement verbal ou annoncé par téléphone, même suivi le jour même de l’envoi de la lettre de notification du licenciement est sans cause réelle est sérieuse (Cass. soc. 3-4-2024 n° 23-10.931).  De même, si l’employeur annonce publiquement, à tout ou à une partie du personnel, avant la tenue de l’entretien préalable, sa décision irrévocable de licencier un salarié, cela constitue un licenciement verbal dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 23-10-2019 n° 17-28.800). 

Question. L’employeur peut-il préparer le remplacement d’un salarié avant de le licencier, notamment en établissant une promesse d’embauche pour embaucher son remplaçant ?

Chercher à remplacer un salarié avant d’engager la procédure de licenciement

Un salarié directeur général a été convoqué à un entretien préalable le 7 février et licencié pour faute grave le 28 février. Il a contesté en justice son licenciement, estimant avoir fait l’objet d’un licenciement de fait sans cause réelle et sérieuse. Le 24 janvier, avant qu’il soit convoqué à un entretien préalable au licenciement, le salarié avait eu connaissance d’un échange de courriels dans lesquels le président de la société demandait à la responsable des ressources humaines d’établir une promesse d’embauche, à la date du 17 mars, d’un candidat pour le poste de directeur général qu’il occupait En appel, les juges ont donné raison au salarié. Ils ont qualifié ce licenciement de licenciement verbal sans cause réelle et sérieuse. Selon les juges, l’échange de courriels entre le président et la responsable RH, antérieur à l’introduction de la procédure de licenciement, démontrait la manifestation à ce moment précis d’une décision irrévocable de rompre la relation de travail avec le salarié. Ils en ont déduit une volonté non équivoque de l’employeur, manifestée auprès d’une autre salariée de l’entreprise, de rompre le contrat à durée indéterminée du salarié dès le 24 janvier, laquelle devait s’analyser en un licenciement verbal.

Pas de licenciement verbal sans annonce publique ou auprès du salarié

La Cour de cassation a censuré la décision des juges pour violation de l’article L 1232-6 du Code du travail. Elle a jugé que l’intention de l’employeur de recruter un nouveau directeur général, manifestée uniquement par un échange entre le président de la société et la responsable RH afin d’établir une promesse d’embauche, n’avait été exprimée ni publiquement ni auprès du salarié. En conséquence, l’employeur qui conservait la faculté de ne pas mettre en œuvre la procédure de licenciement, n’avait pas manifesté de manière irrévocable la volonté de mettre fin au contrat de travail du salarié.

Pour considérer que l’employeur a rompu le contrat de travail d’un salarié sans lettre de licenciement (licenciement verbal ou de fait), il faut un acte par lequel il manifeste de manière irrévocable, publiquement ou au salarié, sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Ce qui n’était pas le cas dans cette affaire.

Source : Cass. soc. 26-3-2025 n° 23-23.625

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