Soc. 2 juill. 2014, FS-P+B, n° 13-15.605

L’AGS (assurance garantie des salaires) permet aux salariés d’obtenir le paiement de leurs créances salariales en cas de redressement ou de liquidation judiciaires. L’obligation de cotiser à l’AGS incombe à tout commerçant, toute personne inscrite au répertoire des métiers, tout agriculteur, toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante et toute personne morale de droit privé employant un ou plusieurs salariés. Toutefois, sont placés en dehors du champ d’application de la loi :

  • les personnes morales de droit public. Toutefois, la Cour de cassation a jugé que les personnes morales de droit privé assurant la gestion d’un service public étaient assujetties ainsi que les sociétés d’économie mixte ;
  • les particuliers employeurs ;
  • les syndicats de copropriétaires.

Cet arrêt du 2 juillet 2014 est donc l’occasion pour la Cour de cassation d’expliciter le régime juridique applicable et de confirmer son revirement intervenu le 29 janvier 2000. La Cour

avait considéré qu’une société de télévision, soumise à la législation sur les sociétés  anonymes, a la qualité de personne morale de droit privé et doit donc assurer ses salariés contre le risque de non-paiement des sommes dues en exécution du contrat de travail, même si certaines règles applicables en matière de procédures collectives ne lui sont pas applicables. Puis, c’est par un arrêt du 7 septembre 2004 que la Cour a enrichi sa motivation en précisant que l’ancien article L. 143-11-1 (C. trav., L. 3253-6) n’était pas contraire aux lois spécifiques régissant l’entreprise France Telecom laquelle est soumise aux lois sur les sociétés anonymes lui conférant la qualité de personne morale de droit privé.

Dans l’arrêt ici rapporté, la question mérite d’être posée en des termes identiques. L’article L. 3253-6 du code du travail dispose que « tout employeur de droit privé assure ses salariés, y compris ceux détachés à l’étranger ou expatriés mentionnés à l’article L. 5422-13, contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail, en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ». La question posée à la Cour était donc la suivante : le régime légal spécifique des sociétés France 2 et RFO intégralement détenues par l’État et qui ne peuvent être dissoutes qu’en application d’une loi déroge-t-il à la législation de droit commun applicable aux sociétés anonymes ?

La société France Télévisions, venant aux droits de France 2, contestait que Pôle emploi réclame le versement de ces cotisations à raison de leur forme de sociétés de droit privé, alors que la société France Télévisions, venant aux droits de ces sociétés depuis le 1er janvier 2009, n’y était pas assujettie en raison de la particularité de ses statuts et sa mission de service public.

Après avoir constaté qu’en vertu de l’article 47 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication modifiée par la loi n° 94-88 du 1er février 1994, les sociétés France 2 et RFO étaient soumises à la législation sur les sociétés anonymes, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi. Elle retient une solution conforme à celle retenue dans ses décisions antérieures. Elle rappelle ainsi la règle selon laquelle « l’assujettissement de l’employeur à l’obligation d’assurance des salariés résulte de sa seule qualité de personne morale de droit privé, sans qu’il y ait lieu de tenir compte de son statut particulier, et notamment de l’origine de son capital, de la nature de ses ressources, du contrôle économique et financier de l’État auquel il est soumis, du mode de désignation de ses administrateurs et de la mission de service public dont il est investi ».

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