Soc. 14 avr. 2021, n° 19-23.589

La chambre sociale de la Cour de cassation s’est penchée sur la question de l’étendue de l’expertise que le code du travail (art. L. 2315-94 3° et L. 2315-95) permet, pour les entreprises d’au moins 300 salariés, au comité social et économique (CSE) de diligenter afin de préparer une négociation sur l’égalité professionnelle dans l’entreprise : est-elle limitée à la seule situation dans laquelle le CSE est amené à négocier l’accord relatif à l’égalité professionnelle en l’absence de délégué syndical (C. trav., art. L. 2232-24 et suivants) ou est-elle d’application générale ?

Le CSE (central) d’une entreprise avait décidé du recours à une expertise « relative à la qualité de vie au travail incluant l’égalité professionnelle ». L’employeur contestait devant le président du tribunal de grande instance la délibération du comité en relevant que celle-ci ne participait pas à la négociation sur l’égalité professionnelle, de sorte que l’instance représentative ne pouvait recourir à un expert pour la préparer.

À cette argumentation, la haute juridiction oppose une acception large du recours à l’expertise, estimant qu’elle peut permettre d’apporter aux organisations syndicales en charge des négociations toute analyse utile dans le cadre de la préparation de la négociation sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. La chambre sociale indique en outre que cette expertise doit être diligentée en temps utile par rapport à la négociation collective, ce qui était le cas en l’espèce (l’expertise avait été décidée en CSE après le début de la négociation mais plusieurs mois avant son aboutissement).

Un tempérament est néanmoins apporté par les juges du quai de l’Horloge : l’expertise ne peut être élargie à d’autres champs de négociation, le code du travail ne le prévoyant pas. Le CSE ne pouvait donc pas, en l’espèce, mettre en place une expertise visant la qualité de vie au travail incluant l’égalité professionnelle. Dès lors, le président du tribunal de grande instance aurait dû faire droit à la demande de l’entreprise tendant à limiter l’étendue de l’expertise à cette dernière thématique.

Enfin, sur le fondement du 1° de l’article L. 2315-80 du code du travail relatif au financement des expertises, l’arrêt précise qu’en l’absence de tout indicateur relatif à l’égalité professionnelle au sein de la base de données économiques et sociales, les frais d’expertise sont intégralement pris en charge par l’employeur ; dans les autres cas, les frais de l’expertise sont répartis à hauteur de 20 % pour le CSE et 80 % pour l’employeur – et ici, la chambre sociale applique le 2° de l’article L. 2315-80, s’agissant d’une consultation ponctuelle. On le voit, il appartient ainsi au juge de contrôler les éléments mis à disposition du CSE dans la base de données précitée afin de fixer, en cas de litige, la répartition du coût de l’expertise.

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