Projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, texte n,° 342, 26 mai 2014

Le 26 mai 2014, l’Assemblée nationale a définitivement adopté le projet de loi relatif à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises dans sa version issue de la commission mixte paritaire (CMP). Le texte sera entériné par le Sénat le 5 juin.

Volet Baux commerciaux

On retiendra tout d’abord de ce texte (art. 1er, AAA) que l’application du statut demeure applicable lorsque la préemption porte sur un bail commercial (dans la version du Sénat, seuls étaient visés le fonds artisanal et le fonds de commerce). Et la contradiction entre cette disposition et celle contenue à l’ancien article 7 du texte disparaît.

Quant à l’exclusion expresse du statut des baux commerciaux des commerces intégrés voulue par la chambre haute, elle n’apparaît plus.

Par ailleurs, les baux des locaux de stockage rejoignent la liste des contrats pour lesquels une sortie triennale peut être conventionnellement prohibée (modification de l’art. L. 145-4, C. com.), tandis que disparaît la précision portée à l’article L. 145-12 du code de commerce, selon laquelle les parties à un bail de plus de neuf ans peuvent convenir de son renouvellement pour la même durée.

Le texte soumet en outre les baux (dérogatoires, statutaires ou professionnels) en cours lors de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle à l’obligation d’établir un état des lieux de sortie, dès lors qu’un état des lieux d’entrée aura été dressé.

La définition de la notion de convention d’occupation précaire, insérée à l’article 1709 du code civil par les sénateurs, est réintégrée dans un article L. 145-5-1 du code de commerce.

En ce qui concerne l’indice de révision, la référence, dans les articles L. 145-34 et L. 145-38 du code de commerce, à l’indice national trimestriel mesurant le coût de la construction est supprimée.

Quant au « plafonnement du déplafonnement », il est maintenu et concerne à présent également l’hypothèse où il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d’une clause du contrat relative à la durée du bail (modification des art. L. 145-34, L. 145-38 et L. 145-39, C. com.).

Enfin, l’obligation de communiquer des justificatifs de charges lors de la conclusion du bail, puis tous les trois ans n’est plus réservée aux ensembles immobiliers (C. com., art. L. 145-40-2).

Volet TPE

Les dispositions concernant le statut de l’artisan et le dispositif de l’EIRL prennent en compte les améliorations apportées par le Sénat (pour rappel, celui-ci avait notamment, par souci de clarification, modifié la définition des métiers d’art), quelques amendements rédactionnels ayant néanmoins été adoptés.

Mais une fois encore, c’est le régime de l’auto-entrepreneur qui a suscité les controverses les plus vives. Interrogée par le député Laurent Grandguillaume le 13 mai 2014, Valérie Fourneyron, la nouvelle secrétaire d’État en charge du portefeuille des PME, avait déjà fait savoir son souhait d’écarter les modifications apportées par le Sénat et de revenir à la rédaction du projet de loi telle qu’issue de son adoption par l’Assemblée nationale, cette version lui paraissant équilibrée. C’est chose faite. Le très controversé amendement Schurch avait, on s’en souvient, supprimé la présomption de non-salariat dont bénéficient les auto-entrepreneurs, au nom de la lutte contre le salariat déguisé et, à cette fin, abrogé l’article L. 8221-6-1 du code du travail (art. 12 A).

Pour le député Grandguillaume, « cette présomption de salariat déguisé serait une mesure de complexification et créerait une insécurité juridique pour tous les travailleurs indépendants de notre pays. Alors que, sur 1 500 contrôles réalisés par l’URSSAF, seuls 2 à 3 % de situations ont été reconnues comme étant du salariat déguisé. Va-t-on contraindre 97 % des micro-entreprises pour 3 % de cas avérés ? ». Le député est parvenu à convaincre la CMP, puisque l’article 12 A du projet de loi est finalement abrogé. Par ailleurs, le Sénat avait élargi les cas de dispense de stage préparatoire à l’installation (SPI) pour les entrepreneurs du secteur de l’artisanat ayant déjà bénéficié d’un accompagnement à la création d’entreprise délivré par un réseau d’aide à la création d’entreprises (art. 13 bis). Là encore, on revient à la position de l’Assemblée nationale : la gestion du SPI relèvera de la seule compétence des chambres des métiers et de l’artisanat, lesquelles se sont d’ailleurs engagées à le moderniser.

Volet public

Ce projet de loi a pour ambition de renforcer le commerce et l’artisanat de proximité en passant d’une logique d’adhésion à un rééquilibrage des relations contractuelles en matière de baux commerciaux. Il crée, à titre expérimental, le contrat de revitalisation commerciale qui a pour objectif de diversifier et de moderniser les activités dans des périmètres marqués par une disparition progressive de l’offre commerciale. La commune pourra également déléguer son droit de préemption commercial sur les fonds artisanaux, les fonds de commerce, les baux commerciaux et les terrains faisant l’objet de projets d’aménagement commercial à l’établissement public de coopération intercommunale dont elle est membre. Les députés ont étendu cette possible délégation aux sociétés d’économie mixte ainsi qu’aux titulaires d’un contrat de revitalisation commerciale.

Un permis de construire tenant lieu d’autorisation

La future loi intègre l’urbanisme commercial dans l’urbanisme de droit commun. Ainsi, lorsqu’un projet sera soumis à autorisation d’exploitation commerciale, le permis de construire tiendra lieu d’autorisation dès lors que la demande de permis aura fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) ou, le cas échéant, de la commission nationale d’aménagement commercial. L’avis de la CDAC demeure mais la prise de position de la commission est ramenée au rang d’avis conforme.

Seul le permis de construire sera attaquable devant la cour administrative d’appel, qui devient compétente en premier et dernier ressort pour connaître de cette question. Conséquence directe de cette évolution, le Sénat a rendu le schéma de cohérence territoriale (SCOT) directement opposable à la demande de permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale. Les SCOT pourront, par ailleurs, comporter un document d’aménagement artisanal et commercial déterminant les conditions d’implantation des équipements commerciaux qui, du fait de leur importance, sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire et le développement durable.

Occupation du domaine public

En application des principes de la domanialité publique, l’autorisation d’occupation du domaine public est personnelle et non cessible. Par souci de simplification, le projet de loi permet au futur acquéreur d’un fonds de commerce de demander une autorisation d’occupation temporaire du domaine public par anticipation, si cette occupation est liée à l’exploitation du fonds. Les héritiers ou ayants droit, en cas de décès de l’exploitant, bénéficieront de cette autorisation pour la durée restant à couvrir dans la limite d’un an. Le nouveau bénéficiaire devra maintenir inchangée l’activité du fonds de commerce.

Par ailleurs, le titulaire d’une autorisation d’occupation au sein d’une halle ou d’un marché aura la possibilité de présenter à l’autorité municipale un successeur. Cette personne, en cas d’acceptation par le maire, sera subrogée au titulaire dans ses droits et obligations.

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