Com. 27 janv. 2015, FS-P+B, n° 13-20.463

Rendu encore sous le régime de la loi du 25 janvier 1985, le présent arrêt énonce deux solutions, l’une et l’autre désormais affectées par la récente réforme opérée par l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014.

Sur le premier moyen, la Cour de cassation énonce que : « la décision qui annule l’ouverture d’une liquidation judiciaire ne prive pas la déclaration de créance de son effet interruptif de prescription, qui se prolonge jusqu’à cette décision ». Ainsi, contrairement à ce que se plaisait à soutenir l’associé unique d’une société dissoute auquel le patrimoine de celle-ci avait été dévolu par voie de transmission universelle, poursuivi par la banque créancière de la société, l’annulation de l’ouverture de sa liquidation judiciaire ne rend pas « non avenu » l’effet interruptif de la prescription attaché à la déclaration de créance. De sorte que la nouvelle déclaration effectuée, dans la nouvelle procédure de liquidation judiciaire ouverte d’office par le tribunal (c’était encore possible en 2003) plus de dix ans après le début du cours de la prescription (de dix ans encore, avant la réforme du 17 juin 2008, qui l’a ramenée à cinq ans), suivie d’une ordonnance d’admission, était bien valable.

Cette jurisprudence demeure aujourd’hui pleinement valable. Mais, pour les procédures ouvertes à compter du 1er juillet 2014, son fondement n’est plus seulement prétorien. C’est désormais la loi elle-même, à travers l’article L. 622-25-1 du code de commerce, ajouté par l’ordonnance du 12 mars 2014, qui dispose : « La déclaration de créance interrompt la prescription jusqu’à la clôture de la procédure ; elle dispense de toute mise en demeure et vaut acte de poursuites ».

Sur le second moyen, en réponse à la contestation par le débiteur de l’admission de la créance par un moyen de défense au fond pris de la responsabilité de la banque, au motif qu’elle aurait laissé croire qu’elle interviendrait à première demande en cas de défaillance de la société, qu’à tort les juges du fond avaient jugé irrecevable, la chambre commerciale énonce, pour casser l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 621-104 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, que : « le juge de la vérification des créances qui est saisi d’une contestation ne relevant pas de son pouvoir juridictionnel et susceptible d’avoir une incidence sur l’existence, le montant ou la nature de la créance déclarée est tenu de surseoir à statuer sur l’admission de celle-ci, après avoir invité les parties à saisir le juge compétent ».

Sans être totalement dépassée, cette solution classique ne saurait plus être affirmée de manière si péremptoire, notamment parce qu’aux termes de l’article L. 624-2 tel qu’issu de l’ordonnance du 12 mars 2014, et pour les procédures ouvertes à compter de cette date, « En l’absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l’a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d’admission ». Cependant, cet assouplissement ne devrait guère modifier la donne, puisque est maintenue la réserve de l’absence de contestation sérieuse.

Ainsi, en l’espèce, le juge-commissaire n’aurait sûrement pas pu statuer sur la responsabilité du banquier, laquelle relève, sauf hypothèse improbable où ce dernier ne la contesterait pas, de la compétence du tribunal de commerce.

Auteur : Editions Dalloz - Tous droits réservés.