Civ. 3e, 3 oct. 2012, FS-P+B, n° 11-21.923

L’article L. 442-3 du code de la construction et de l’habitation n’opérant pas de distinction selon le caractère collectif ou individuel de l’immeuble, un tribunal ne peut rejeter la demande de paiement des charges locatives d’un bailleur HLM au motif qu’une stipulation du contrat en prévoit le paiement pour les seuls immeubles collectifs.

Le locataire doit-il s’acquitter des charges locatives lorsque le contrat ne le prévoit pas expressément ? La réponse à cette question diffère selon le régime auquel est soumis le contrat de bail.

Le code civil ne connaît que la notion de loyer et non celle de charges. Ainsi, dans les baux de droit commun dès lors qu’aucune disposition supplétive de volonté n’est applicable, à défaut de stipulation expresse, le bailleur ne peut recouvrer les charges. Ce principe s’applique également pour les baux commerciaux, les dispositions statutaires étant muettes sur ce point, ou encore pour les contrats administratifs.

Le corolaire est que les parties sont libres de définir les charges supportées par le preneur, leur répartition et leur recouvrement. Sont licites les clauses prévoyant un mode de calcul forfaitaire, de même que celles stipulant un « loyer net de charge ». Mais, en application de l’article 1162 du code civil, ces clauses sont soumises à une interprétation stricte en faveur du locataire (Paris, 30 juin 2004). La Cour de cassation a ainsi pu estimer que la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ne peut être mise à la charge du preneur qu’en vertu d’une clause contractuelle (Civ. 3e, 13 juin 2012).

La législation relative aux baux d’habitation oblige le locataire au paiement des charges. L’article 7 a de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 prévoit que le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus. Il en résulte qu’il est redevable des charges en l’absence de toute disposition contractuelle et nonobstant toute disposition contraire. Ainsi, la Cour d’appel de Paris a-t-elle précisé que l’absence de stipulations afférentes à une provision n’exonère pas le locataire de payer les charges (Paris, 3 oct. 2006).

Le principe est le même lorsque le local loué appartient au secteur HLM. L’article L. 442-3 du code de la construction et de l’habitation prévoit que, nonobstant toute disposition ou stipulation contraire, les organismes d’habitation à loyers modérés récupèrent les charges locatives. Ces dispositions étant d’ordre public, toute clause contraire du bail serait réputée non écrite. C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation.

En l’espèce, le locataire avait cru pouvoir se prévaloir de la rédaction maladroite d’un bail pour ne pas s’acquitter des charges locatives. Le contrat de bail du secteur HLM prévoyait que les charges récupérables « peuvent être dues en matière de collectif ».  Sur le fondement de la force obligatoire du contrat, le tribunal d’Instance avait rejeté la demande en paiement de la société bailleresse, laquelle avait formé un pourvoi. La Cour de cassation a critiqué le jugement attaqué pour avoir statué ainsi alors que l’article L. 442-3 du code de la construction et de l’habitation n’opère pas de distinction selon le caractère collectif ou individuel de l’immeuble dont dépend le bien donné à bail.

Il faut déduire de cette solution que l’article L. 442-3 relève de l’ordre public de direction. Aucune dérogation n’est possible qu’elle soit en faveur du locataire ou du bailleur. C’est également le cas pour les listes des charges récupérables fixées par les décrets n° 87-713 du 26 août 1987 et n° 82-955 du 9 novembre 1982 (Civ. 3e, 10 mars 1999, Bull. civ. III, n° 61). La Cour de cassation estime ainsi qu’un bailleur peut demander le paiement de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères nonobstant le fait que la liste exhaustive des charges récupérables, communiquée par la bailleresse la veille de la signature du contrat ne mentionnait pas cette taxe (Civ. 3e, 10 janv. 1996, Bull. civ. III, n° 9). 

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