Com. 15 nov. 2016, FS-P+B+I, n° 14-27.045

Le droit des procédures collectives et le droit des assurances peuvent parfois se contredire. Et dans un tel cas, c’est le second que la Cour de cassation privilégie.

Il était ici question de la règle posée par l’article L. 113-3 du code des assurances, en vertu de laquelle à défaut de paiement d’une prime d’assurance dans les dix jours de l’échéance, la garantie ne peut être suspendue que trente jours après une mise en demeure de l’assuré, l’assureur ayant le droit de résilier le contrat dix jours après l’expiration de ce délai. Ce texte heurte de plein fouet l’article L. 622-13, alinéa 3, du code de commerce (rendu applicable à la liquidation judiciaire, procédure en cause ici, par l’art. L. 641-10), en sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 applicable dans l’affaire jugée (la règle a, depuis l’ord. du 18 déc. 2008, pour siège l’art. L. 622-13, III, 1°), aux termes duquel le défaut de paiement d’une somme d’argent entraîne la résiliation du contrat de plein droit. Pour la Cour de cassation, « le second de ces textes n’exclut pas l’application du premier en cas de procédure collective de l’assuré ».

Le propriétaire d’un immeuble (assuré, comme il se doit), avait été mis en redressement puis en liquidation judiciaires les 18 avril 2008 et 15 mai 2009. Mais le 29 mai 2011, l’immeuble fut détruit par un incendie. Après s’être prévalu de la résiliation du contrat d’assurance pour non-paiement des primes sur le fondement de la règle du droit des assurances, l’assureur a refusé de verser l’indemnité, puis déposé une requête en constatation de la résiliation de plein droit du contrat d’assurance au 1er juin 2009, date de la première échéance impayée.

Les juges du fond ont fait droit à la demande de l’assureur. En effet, après avoir relevé qu’il n’était pas contesté que les primes échues entre juin 2009 et juin 2010 n’avaient pas été payées, la cour d’appel de Nancy a retenu que, selon les dispositions de l’article L. 622-13 du code de commerce, le défaut de paiement d’une somme d’argent entraîne la résiliation du contrat de plein droit, les dispositions des alinéas 2 à 4 de l’article L. 113-3 du code des assurances n’étant pas applicables dans le cadre d’une procédure collective. Pour la cour, la préférence devait donc être donnée au droit des procédures collectives. L’arrêt d’appel est toutefois cassé : le contrat d’assurance n’est pas résilié, faute pour l’assureur d’avoir mis en demeure le liquidateur de payer les primes, ainsi que l’exige l’article L. 113-3 du code de commerce que la Cour de cassation considère applicable. Dès lors, l’assureur devra verser à l’assuré l’indemnité d’assurance consécutivement à l’incendie de l’immeuble assuré.

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