Civ 1re, avis, 19 juin 2019, P+B+R+I, n° 19-70.007

Civ 1re, avis, 19 juin 2019, P+B+R+I, n° 19-70.008

Dans deux avis rendus le 19 juin dernier, la Cour de cassation se prononce, d’une part, sur les conditions de la déclaration judiciaire de délaissement parental unilatéral (C. civ., art. 381-2, al. 4) et, d’autre part, sur les conséquences d’une telle déclaration sur l’admission de l’enfant comme pupille de l’État, sur son adoptabilité et sur la possibilité d’une délégation d’autorité parentale.

Sur le premier point, la Cour indique que le délaissement peut être déclaré, à l’égard d’un seul parent, indépendamment de la situation et du comportement de l’autre parent. Plus précisément, la loi ne subordonne pas la déclaration de délaissement unilatéral à la perte de l’autorité parentale par le parent non délaissant ou à une remise volontaire, par celui-ci, de l’enfant au service de l’aide sociale à l’enfance en vue de son admission en qualité de pupille de l’État. Seule doit être démontrée l’absence de relations nécessaires à l’éducation ou au développement de l’enfant, entre ce dernier et le parent délaissant.

Par ailleurs, selon la haute juridiction, l’intérêt supérieur de l’enfant peut exceptionnellement justifier que le délaissement parental ne soit pas prononcé, alors même que les conditions en sont réunies. Le juge conserve donc en cela une certaine marge d’appréciation 

Sur le second point, la Cour régulatrice relève tout d’abord que « la déclaration judiciaire de délaissement parental unilatérale ne peut avoir pour effet de priver de ses droits parentaux le parent non délaissant ». Aussi estime-t-elle que les articles L. 224-4, 6°, et L. 224-8, I, du code de l’action sociale et des familles doivent être interprétés en ce sens qu’ils « n’autorisent pas l’admission en qualité de pupille de l’État d’un enfant, dont la filiation est établie à l’égard de ses deux parents, lorsque le délaissement parental est déclaré judiciairement à l’endroit d’un seul parent et que l’autre parent, non privé de l’autorité parentale, n’a pas remis volontairement l’enfant au service de l’aide sociale à l’enfance en vue de cette admission ».

De même, le délaissement unilatéral ne saurait priver le parent non délaissant de son droit de consentir - et donc de s’opposer - à l’adoption de son enfant : « si le délaissement parental concerne un seul parent, le consentement à l’adoption de l’autre parent, qui n’est pas privé de ses droits d’autorité parentale, doit être recueilli ».

Enfin, selon la même logique, la Cour considère que la délégation de l’autorité parentale ne peut porter que sur les prérogatives appartenant au parent délaissant, laissant subsister les droits de l’autre parent. Corrélativement, l’exercice conjoint de l’autorité parentale entre le délégataire et le parent non délaissant (s’il exerce cette autorité) ne requiert pas l’accord exprès de ce dernier. Le partage de l’exercice de l’autorité parentale est en effet imposé par l’article 381-2 du code civil, qui ne prévoit pas la nécessité d’un tel accord.

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